Après neuf ans au sein du Team Winamax, il est temps pour Volatile38 de voler de ses propres ailes, le lot plein de belles performances et de souvenirs indélébiles. Il nous dit une dernière fois.
Le règlement de la Top Shark Academy est clair : une victoire donne droit à un CDD au sein du Team Winamax pour une durée d’un an. Ni plus ni moins. Pour Guillaume Diaz, ce sacre acquis un soir de janvier 2014 a marqué le début d’une folle histoire qui s’étalera sur neuf ans. Aujourd’hui, cette histoire touche à sa fin pour Volatile38. Après avoir occupé près d’un tiers de la vie de celui qui est passé entre temps de rookie pas encore tout à fait pro à figure connue et respectée de la scène francophone, de gamin de 22 ans à jeune père de famille dans la trentaine.
« J’étais encore étudiant, rembobine Guillaume pour un ultime entretien avec la rédaction de Wina. Je venais de rentrer d’une année sabbatique en Australie, durant laquelle j’avais tenté de devenir pro du poker, sans succès. cette année de reprise d’études que j’ai intégré la Team, un peu par la force des choses. Jusque-là, je gagnais un peu d’argent avec le poker, mais pas de quoi vivre. Moi qui avait au moins prévu d’aller jusqu’au bout de mes études , j’arrête tout.» A peine entré dans l’équipe, l’impact sur la vie du jeune Grenoblois est déjà immense.
En janvier 2014, le Team Winamax était loin de ce qu’il est aujourd’hui. Les propriétaires s’appellent alors Ludovic Lacay, Manuel Bevand et Michel Abécassis ; seuls deux Top Sharks ont subi le plâtre avant Guillaume ; Davidi Kitai n’est pas encore tout à fait le leader charismatique qu’il s’apprête à devenir, et le marché européen n’est encore qu’une chimère lointaine. Surtout, le quotidien d’un joueur de poker professionnel est à mille lieues de la rigueur actuelle. « L’année d’avant, le Coach s’était brouillé avec les joueurs suite à une soirée assez arrosée la veille de l’EPT Deauville. Il leur avait écrit un blog qu’il m’avait transmis à mon arrivée. Alors on commençait à être plus sérieux. Un an plus tard, Cuts a pris sa retraite, marquant en quelque sorte la fin de cette période du pro amateur de poker. » Le train est donc déjà en marche, et Guillaume donne tout pour embarquer et rester à bord. « J’étais très jeune, donc je buvais les paroles de tout le monde. Via Steph’, les valeurs qu’il a insufflées au sein de l’Equipe et des autres joueurs, j’ai voulu apprendre un maximum pour rester performant, continuer mon parcours de pro et , en général, pour m’épanouir personnellement. »
« Ça a changé ma vie »
Un apprentissage « à marche forcée » qui a façonné la carrière de Guillaume. Nul ne peut dire quelle aurait été sa carrière si son contrat avait pris fin plus tôt, mais une chose est sûre : loin du Team Winamax, l’expérience aurait été bien différente. Jouer les plus beaux tournois du monde, bénéficier d’un accès privilégié aux joueurs les plus en vue, francophones et internationaux, rencontrer le staff qui officie sur les différents festivals live ainsi que nous autres collaborateurs Winamax : oui, le statut de Team Pro ouvre de nombreuses portes. « Au-delà du poker, travailler avec Winamax a été une ouverture incroyable sur le monde. J’ai pu échanger avec des gens d’autres mondes comme Daniel Riolo. Au sein de la Team, j’ai beaucoup appris de quelqu’un comme Bruno [Kool Shen] qui a traversé une beaucoup avant le poker. Ça a changé ma vie. Une vie alors faite de tout un paquet d’aventures dont certaines devront rester des secrets plus ou moins bien gardés. « Je me souviens d’une soirée à Monaco avec Bruno, Antonin [Teisseire] et labrik [Louis Linard, ndlr]. Après le resto, on se retrouve à s’embrouiller avec Chance Kornuth et ses amis. Les choses se calment et on va dans la chambre de un des amis de Bruno à la Baie. On passe la nuit à parler de sujets vraiment personnels et on finit par voir le soleil se lever au-dessus de la mer. Humainement, c’était fort.
De quoi rapidement transformer ses collègues en véritables amis. Voyages, soirées, restaurants, pauses dîner, jours off, post-élimination ou post-victoires : il faudrait bien plus qu’un simple article pour répertorier tous ces moments de convivialité et de bonheur partagés. Ce n’est pas pour rien si, en juin 2021, alors que le monde du live était à l’arrêt depuis près d’un an et demi, Guillaume désignait le poker comme la plus collective des activités individuelles. De la Team aux différents colocataires de joueurs dont il faisait partie, Volatile a toujours fait son nid bien entouré. Comme pour un discours de remise de prix, le risque de ne pas citer tout le monde et d’en offenser certains est trop grand. Alors s’il ne fallait en citer que deux, ce serait Davidi Kitai d’un côté et Romain Lewis de l’autre. « Romain est la personne dont j’ai été le plus proche tout au long de ma carrière, et encore plus ces dernières années. C’est la plus belle rencontre que le poker m’ait faite et aujourd’hui, c’est lui le parrain de mon fils. Le voir partir de rien puis grandir monter, arriver dans la Team, enchaîner les performances, devenir Champion du Monde et vivre tout ça avec lui, partageant souvent les mêmes chambres d’hôtel ou Airbnb, ça a été un plaisir absolu. » Quant au génie belge, il a joué le rôle de mentor presque du début à la fin. « C’est celui qui m’a le plus aidé et m’a fait évoluer dès les premières années. A San Remo en 2014, on casse tous les deux le jour 1 et on se retrouve devant le casino. On est allé prendre des glaces, on a parlé pendant deux heures et il m’a donné beaucoup de conseils. Dav’ a cette capacité à se mettre à la place des gens et à penser comme eux. Il m’a aussi soutenu financièrement. Je ne le remercierai jamais assez pour tout ce qu’il a fait pour moi.
En neuf ans, Guillaume a aussi pu expérimenter toute la diversité qui fait le sel de notre jeu préféré. Des étapes freeroll du Winamax Poker Tour [cette interview a été réalisée dans le cadre du WiPT Rennes, ndlr] au PS Players Championship à 25 000$, en passant par les festivals EPT, les World Series of Poker, le live Winamax, les cercles Stations parisiennes et caribéennes, « Volatar » a tout joué, sur les cinq continents. Une multiplicité de tournois à laquelle s’ajoute celle des profils rencontrés. « C’est ce qui m’a rendu accro au poker dès le départ : être à table avec n’importe qui, de n’importe quelle nationalité. On peut passer des heures, des jours, des semaines à jouer ensemble. Le poker fait tomber toutes les barrières sociales. » Là encore, une rencontre plus folle qu’une autre ? « Celui qui me fait le plus halluciner, c’est Jean-Noël Thorel [milliardaire français du secteur pharmaceutique qui joue régulièrement les highrollers les plus chers du circuit, NDLR]. Il est gentil et aimé de tout le monde. Il a une vie de dingue et on sent qu’il aime ce jeu. »
Une carrière exemplaire
De son côté, Volatile a plus d’une fois eu l’occasion de prendre sa part du butin. A commencer par… son tout premier festival sous les couleurs du Team Winamax, à l’EPT Deauville 2014. « Une histoire de titres, de bizutage et de slowroll. » Condamné à revêtir un costume de requin du plus bel effet sur le Main Event, le nouveau Top Shark tient quatre heures avant de se rabattre sur un Side Event à 2 200 €… qu’il remporte pour 91 000 €, mais non sans provoquer quelques remous . « Je joue all-in move contre deux pros dans un spot pas évident où je mets un peu de temps à caller, et derrière eux ils m’accusent dans des tweets de les avoir slowrollés, en taguant Winamax. Donc je me retrouve à devoir m’expliquer à Steph’ et à Guignol – que je voyais pour la première fois – alors qu’il y avait déjà une merde impossible sur ClubPoker. » Un début brillant donc, suivi quatre ans plus tard de son coup d’éclat majeur : la victoire de l’EPT National Monte-Carlo pour 250 000 €, toujours sa plus grosse victoire à ce jour. Émotionnellement, il a également eu sa première table finale WSOP, en 2016 sur le Little One for One Drop. « Celui-là était violent. Il y avait un gros rail, et sur la main où j’ai busté, je sais tout de suite que j’ai fait un vomi. » Un sentiment de frustration à l’égard des World Series qui s’est répété l’année suivante, avec une huitième place sur les Crazy Eights et surtout le Main Event des WSOP-Europe en 2021. Énorme chipleader lors des demi-finales, il termine 11e après perdre un pot monstrueux qui l’aurait propulsé dans l’ultra-favori pour le titre. « Un très gros regret. Gagner ce coup aurait changé beaucoup de choses. » Avec tout ça, on oublierait presque qu’il est passé tout près de remporter le Winamax Poker Open de Dublin en terminant troisième devant son grand ami Louis Linard mais derrière un certain Pierre Calamusa.
C’est en ligne que Volatile38 a été le plus constant, accomplissant un certain nombre d’exploits. De sa première victoire sur le High Roller (signé le mois de son entrée dans le Team Winamax) jusqu’à son troisième et dernier sacre sur le Main Event (cela remonte à août dernier, depuis sa chambre d’hôtel lors de l’EPT Barcelone) en passant par l’un de ses trois titres Winamax Series, 72 000 € gagnés… à 30 000 pieds en plein vol Macao-Zurich (un exploit qui mérite une mention dans le Guinness Book), Guillaume n’a cessé de terroriser les plus hautes tables de notre site. Un savoir et une expertise qu’il a toujours cherché à partager, jusqu’au dernier moment, que ce soit à travers notre École de Poker ou lors de Masterclasses délocalisées à la rencontre de nos joueurs.

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Et maintenant ?
Mais même après cette litanie de résultats hallucinants, Guillaume sait rester humble et humain. Sa plus grande réussite en tant que joueur de poker n’a rien à voir avec l’argent, et l’auto-satisfaction ne lui vient pas naturellement. « Ce dont je suis le plus fier, c’est l’image que j’ai renvoyée. Je m’entends bien avec tout le monde. C’était important pour moi de montrer que, même si on est dans une discipline où le but est de prendre l’argent des joueur d’en face, l’essentiel est de passer un bon moment et de rencontrer des gens formidables. » Et ce, en neuf ans qui ont vu le rôle de joueur sponsorisé évoluer considérablement, avec l’apport non négligeable du streaming. « Je n’étais pas du tout connecté à Twitch avant de devoir me lancer. En 2020/2021, pendant les confinements, j’ai apprécié la proximité avec les spectateurs, le fait de créer une communauté, d’avoir des gens qui reviennent et interagissent avec eux sur une longue période de temps. »
Une décennie en images
Après avoir pas mal bougé, vécu aussi bien en France qu’à Prague ou à Londres, et maintenant installé à Valence avec une compagne et un enfant, quel sera l’avenir de Guillaume Diaz ? « Je n’ai pas encore reconsidéré mes objectifs. Je suis toujours en train de digérer les nouvelles et de me demander ce que je veux faire. Je ne sais pas si je vais continuer le poker à plein temps. Que ce soit en direct ou en ligne, le sentiment exaltant de la Les débuts ont fait place à un peu de redondance. Donc je suis dans le flou, mais c’est un sentiment qui me plaît : beaucoup de possibilités s’ouvrent à moi, j’ai envie de les analyser de manière lucide et sereine. Il y a neuf ans , j’ai pris la décision de faire la Top Shark Academy et l’effet boule de neige a été instantané. Pour cette fois, je suis content de pouvoir prendre mon temps. Mais une chose est sûre : j’aime trop le poker, je vais tout jouer ma vie. » Et qui sait, peut-être serons-nous encore là pour raconter vos histoires. Bon vent, ou plutôt bon vol Guillaume !

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Il y a dix ans, lorsque le Team Winamax sacré vainqueur annuel du Top Shark, rendez-vous était pris à Deauville pour son étape European Poker Tour… et bizutage en vue !
Mais pour Guillaume, ce baptême n’était pas seulement l’occasion de revêtir un costume idiot. C’était aussi, déjà, l’occasion de fêter sa première victoire sous les couleurs du Team Winamax : un titre à 91 000 € décroché lors d’un side-event à 2 000 € d’entrée.
2015, lors du séminaire annuel : pour se faire une place dans la Team, Guillaume a pu profiter de l’expérience du doyen du Top Sharks, Ludovic « mikedou » Riehl. Lui aussi avait su transformer son CDD d’un an en quelque chose de plus durable…
2015, toujours au séminaire : avec Michel Abécassis, complice de plusieurs générations de Top Sharks
2015, au SISMIX de Marrakech, aux côtés de Kool Shen : un coéquipier qui deviendra vite un ami proche.
2015 a été l’année des quasi-triomphes, avec cette troisième place au Winamax Poker Open de Dublin remportée par Pierre Calamusa qui venait de rejoindre l’équipe…
… et une seconde place à 100 000 € sur l’étape parisienne du circuit WPT National, derrière le Chinois Yingui Li.
2016 : première expérience d’une table finale dans le temple des World Series of Poker : une 9e place sur le Little One for One Drop à 1 111 $ l’entrée…
… suivi, l’été suivant, d’une 8e place sur le Crazy Eights devant plus de 8 000 inscrits. Guillaume a été éliminé par le vainqueur final, le Roumain Alexandru Papazian.
2017 : en déplacement à Macao, la Team reste unie pour soutenir Guillaume à la table finale d’un side-event.
2017 : année après année, le Winamax Poker Tour a été l’occasion de rester en contact avec le monde amateur.
2018 : une performance indélébile, une photo souvenir inoubliable et un record de carrière : l’EPT National de Monte Carlo et son premier prix de 250 000 €.
2019, SISMIX Costa Brava, avec sa compagne Miriam : lors des festivals live Winamax, l’essentiel était souvent loin des tables de poker.
2021 : peut-être que Guillaume ne manquera pas les idées tordues de la rédaction et du studio pour habiller ses articles sur le blog… Comme celui-ci, annonçant l’arrivée prochaine de son fils Noah.
2022 : une des dernières photos de groupe, pour le lancement à Madrid du WiPT espagnol.