Alors que 615 millions d’euros ont été misés en ligne pendant la Coupe du monde, selon l’Autorité nationale des jeux, Mehdi, ancien accro aux jeux d’argent, raconte comment les paris sportifs ont ouvert la porte à son addiction.
La Coupe du monde de football masculin sera-t-elle le premier pas pour certaines personnes vers l’addiction au jeu ? 615 millions d’euros ont été misés en ligne pendant la compétition, un montant plus élevé que prévu, a annoncé samedi l’Autorité nationale des jeux (ANJ).
Dans le cas de Mehdi, qui a témoigné ce mardi sur BFMTV, les paris sportifs ont été une porte d’entrée sur son parcours de toxicomane au jeu. « Je ne connaissais les paris sportifs il y a plus de quatre ans que par des publicités aux arrêts de bus », dit-il sous couvert d’anonymat. .
Jusqu’à 6000 euros de mise par main
Petit à petit, Mehdi jouait de plus en plus et augmentait les mises. « J’ai commencé par les paris sportifs et petit à petit, quand les défaites se succèdent, le cerveau veut récupérer cet argent et il faut jouer et gagner plus vite » poursuit le jeune homme qui « contribue donc au casino en ligne ».
Au plus fort de son addiction, il a déclaré qu’il pariait jusqu’à 6 000 euros par main au blackjack.
L’ancien toxicomane explique comment le jeu affecte son humeur : « Si on gagne un pari, ou une partie de blackjack dans un casino, on sera bien avec nos proches, on a envie d’être avec eux, de s’amuser avec eux ». En revanche, « quand on est sur le point de vivre une perte, on va se refermer et nos proches ne comprennent pas ».
Une maladie reconnue
Il affirme être tombé en dépression durant cette période : « Parce qu’on n’aimait pas la vraie vie, on s’est plongé dans les jeux, ça nous a fait oublier qu’on avait de gros ennuis ». Mehdi dit avoir « complètement arrêté » de jouer il y a un an et demi : « J’ai été électrocuté quand ma banque m’a envoyé un courrier me disant qu’ils allaient fermer mon compte », raconte celui qui dit avoir contracté pas moins de huit crédits jouer.
Ce genre de comportement est malsain, confie le médecin toxicomane Juliette Hazard sur BFMTV. Le jeu et l’addiction aux jeux d’argent sont une dépendance comportementale, ou « addiction sans substance », qui se « caractérise par l’incapacité à contrôler la pratique d’une activité », explique l’Assurance maladie sur son site internet. « La sensation de tension accrue apparaît avant de passer à l’action et au moment de l’exercice, la personne ressent du plaisir ou du soulagement », ajoute l’Assurance maladie.
Selon une étude de l’Observatoire des jeux – organisme public supprimé en 2020 – publiée en 2015, « les joueurs problématiques (joueurs à risque excessif ou modéré) » sont plutôt de sexe masculin et sont « plus jeunes que tous les joueurs ». Ils appartiennent à un « milieu social plus modeste » et sont moins qualifiés et moins actifs professionnellement que le reste de la distribution.
Des publicités qui ciblent les jeunes
Certaines publicités sur les jeux d’argent s’adressent spécifiquement à ce public, ciblant notamment les jeunes par exemple, regrette l’Association française des toxicomanies.
Le 19 décembre, Addictions France a dénoncé les « techniques marketing douteuses » des sociétés de paris sportifs et d’alcool, « un autre vainqueur » de la Coupe du monde, selon elle.
« Très répandus dans les lieux publics et sur Internet », les exploitants de sites de paris en ligne et les alcooliques « encouragent les pratiques malsaines tout en liant clairement le football à la consommation d’alcool et aux jeux d’argent », écrit l’association dans un communiqué. Autrefois législateur communiste, le député LFI Carlos Martens Bilongo a déposé mi-décembre un projet de loi visant à interdire la publicité sur les paris sportifs pour limiter l’addiction qui en résulte.